Guerre et pollution en Europe

La planète avait pu respirer pendant ces 2 dernières années d’épidémie car les activités humaines s’étaient considérablement ralenties. Mais le virus d’autodestruction, si répandu dans notre monde, a vite repris l’ascendant en 2022. La guerre en Ukraine engendre une pollution massive qui a des répercussions sur toute l’Europe, mais aussi sur l’ensemble de la planète. Les politiques se positionnent en pompiers alors qu’ils ne font qu’ajouter de l’huile sur le feu que la planète subit.

Biodiversité Ukrainienne

Souvent, lorsque l’on pense écologie, on pense biodiversité. Or il est établi que l’Ukraine recèle 35% de la biodiversité européenne1. Grâce à ses milieux naturels différents, elle héberge une diversité animale et végétale variée. Le pays compte 40 parcs nationaux2. Il est évident que toute cette nature ne sera ni respectée par les chars, ni les obus.

Production massive de polluants

Toute guerre produit des polluants :

  • Les obus peuvent contenir différents métaux lourds : cuivre, plomb, tungstène… Et les matières explosives regorgent de toxiques divers.
  • Les mines anti-personnelles regorgent de divers toxiques qui sont libérés lors de leur explosion.

Mais cela n’est rien à côté des spécificités ukrainiennes.

En effet, l’Ukraine possède 24 000 infrastructures industrielles toxiques. La destruction de raffineries, de pipelines ou d’usines chimiques et d’industrie lourde, provoquent des rejets dans l’air ou dans les sols d’une multitudes de molécules chimiques.

De plus, l’Ukraine est connu comme « Grenier de l’Europe », utilisant massivement les engrais. Or ils regorgent de métaux lourds comme le cadnium3 ou l’uranium4. En cas d’incendie, les engrais libèrent des quantités importantes de gaz toxiques5 (ammoniac, oxydes d’azote, monoxyde et du dioxyde de carbone)

Enfin, l’Ukraine possède plusieurs anciennes mines de minerais, où du mercure et de l’arsenic étaient utilisés. Pour creuser ces mines, les ingénieurs pouvaient avoir recours à des explosions nucléaires. De nos jours, elles ne sont plus exploitées, mais elles doivent être pompées pour éviter que l’eau ne véhicule les polluants dans les nappes phréatiques. Or les services environnementaux sont à l’arrêt6.

Ces contaminations ne sont pas uniquement ukrainiennes, elles touchent toute l’Europe :

  • Par les airs : on sait maintenant que le nuage de Tchernobyl ne s’est pas arrêté à la frontière ! Toute l’Europe a été touchée.
  • Par les eaux : les fleuves se jettent dans la mer Noire qui communique avec la mer Méditerranée.

Vous noterez que l’on ne parle même pas ici de la radioactivité potentielle du pays le plus nucléarisé d’Europe, avec ses 15 centrales.

Les « sanctions » et leurs conséquences sur l’écologie

Les dirigeants européens ont décidé de nombreuses sanctions en représailles contre l’agression russe. Parmi celles-ci, l’embargo sur les énergies est sur la table. Déjà, l’Union européenne a décidé  d’interdire 90 % des importations de pétrole russe d’ici à la fin de l’année.

D’autre part, l’Europe cherche des alternatives au gaz russe. Pas question d’embargo pour le moment, mais les prix du gaz ont explosé depuis le début du conflit. Par ailleurs, les Russes rationnent l’approvisionnement.

Pour compenser l’embargo sur le pétrole et le rationnement du gaz russe, les dirigeants des pays de l’Union européenne prennent des décisions délétères pour l’environnement.

La relance des centrales à charbon

L’Allemagne et les Pays-bas relancent leurs centrales à charbon 78‌‌‌. Plusieurs pays européens pensent à les relancer, dont la France9. Or le charbon est sûrement l’énergie la plus polluante10.

L’importation de gaz liquéfié (GNL)

Les pays européens se tournent vers le gaz liquéfié américain. La France en est même désormais le 1er importateur11.

Le GNL est pourtant aussi une catastrophe écologique. C’est le fameux gaz de schiste qui pose de nombreux problèmes environnementaux:

  • Son extraction pollue les eaux car de nombreux produits chimiques sont utilisés.
  • Son extraction libère du méthane, un gaz autrement plus problématique que le CO2 sur son impact sur le réchauffement climatique.
  • Le gaz subit de nombreux traitements chimiques et rejette du CO2 pour être liquéfié12.‌
  • Il faut le transporter par bateaux sur l’Atlantique.
  • Il faut construire des terminaux méthaniers, actuellement insuffisants en Europe.

Pour rappel, la France interdit l’exploitation de gaz de schiste. Pour autant, la législation n’interdit pas d’importer ce gaz sur le territoire national, même s’il est collecté par fracturation hydraulique. Une façon de contourner le cadre légal et d’éviter de mettre cette exploitation dans le bilan carbone du pays. Mais il convient de rappeler que la pollution des États-Unis va nécessairement dans l’océan et donc sur nos côtes.

Bénédiction pour un projet pétrolier contesté

Le gouvernement Français a œuvré13 pour que Total Energie puisse mener à bien son méga projet pétrolier en Ouganda et en Tanzanie14. Pourtant, des banques françaises impliquées dans le projet se sont désengagées sous la pression des ONG.

Ce projet permettra d’exploiter 6,6 milliards de barils. Mais il et très contesté:

  • Il pourrait émettre au moins 33 millions de tonnes de CO2 par an, soit plus de trente fois les émissions annuelles de l’Ouganda et de la Tanzanie, selon l’Institut suédois de l’environnement. Il contreviendrait ainsi à l’Accord de Paris pour le climat, porté justement par le gouvernement Français!
  • Près de 1/3 des forages sont dans des réserves naturelles15.‌
  • Les forages ont lieu sous le lac Albert, réserve d’eau pour l’Ouganda et le Congo.
  • L’oléoduc chauffé traverse de nombreuses zones de biodiversité.
  • Des expropriations de populations sont prévues.

Des sanctions efficaces ?

Cette réorganisation énergétique autour du charbon, du gaz de schiste et du pétrole a pour vocation à se prémunir des coupures de la Russie et de faire pression sur le pays.

Le 1er mars 2022, Bruno Lemaire, ministre de l’économie, disait que « les sanctions allaient provoquer l’effondrement de l’économie Russe ». Pour Ursula Van Der Leyen, cheffe de la Commission Européenne, « la Russie va sombrer dans la décomposition économique, financière et technologique ».

L’écologie est sacrifiée au nom de la politique et de la sécurité énergétique. Mais est-ce vraiment efficace?

On voit une inflation record sur 1 an en Russie : 17,8% contre 8,1% en Europe. En effet, les importations sont difficiles et les chaînes logistiques perturbées par les sanctions.

Mais d’autres chiffres montrent que les sanctions sont peut être plus négatives pour l’Union européenne que pour la Russie :

  • En juin, le cours du rouble est 40% plus élevé face à l’euro et au dollar qu’avant la crise.
  • L’économie russe affiche une balance courante positive record au premier trimestre 202216.‌
  • La Chine et l’Inde achètent le pétrole sanctionné par l’UE, et encore plus de gaz qu’auparavant17.‌

Dès lors, la question se pose : est-on en train de sacrifier l’écologie et l’économie européenne pour des sanctions peu efficaces ?

En conclusion

La guerre en Ukraine est une catastrophe écologique. Les risques écologiques habituels liés aux armes sont considérablement augmentés par la présence d’industries lourdes, de mines, de centrales nucléaires et d’agriculture massivement sous engrais.

Les décisions politiques en matière énergétique privilégient le charbon, le gaz de schiste et l’exploitation pétrolière. L’hyper-urgence du climat et de la biodiversité est sacrifiée.

Les métaux lourds et polluants se répandent dans l’air et dans l’eau, ils souillent les sols et les eaux de l’Europe et du monde.

Cet épisode tragique nous plonge un peu plus dans un environnement pollué par la chimie lourde. Il est certain que nous retrouverons des taux de substances toxiques encore plus élevés qu’aujourd’hui dans nos aliments et nos produits naturels.