Les autorités tuent la levure de riz rouge

Dès le 22 juin 2022, la levure de riz rouge à 10 mg de monacoline K est interdite. Les marques n’ont plus le droit d’en proposer, ni de prétendre qu’elle est bonne pour le cholestérol.

Présentation

Origine

Provenant de la médecine traditionnelle chinoise, elle est très appréciée des personnes qui ont un taux élevé de cholestérol. Selon des études effectuées, elle dispose de nombreuses vertus hypocholestérolémiantes si elle est associée à une hygiène de vie saine. La levure de riz rouge est un organisme microscopique qui se greffe sur le riz rouge pour donner sa pigmentation.

Originaire d’Asie Orientale, ses premières utilisations remontent au 8ᵉ siècle av. J.⁠-⁠C. à des fins thérapeutiques et pour agrémenter les préparations culinaires en tant que colorant et condiment. Elle est intégrée dans la plantation du riz, engendrant la fermentation de celui-ci. Le riz pigmenté est séché et réduit en poudre pour être ajouté aux préparations alimentaires.

Ses propriétés

Avant de voir pourquoi la levure de riz rouge à 10 mg de monacoline K est interdite, nous allons voir ses propriétés.

Les populations en Chine, au Japon, en Corée et aussi en Thaïlande l’apprécient pour ses vertus médicinales. Elle est efficace contre l’indigestion et la diarrhée et améliore également la circulation sanguine.

Les premières références qui en font mention remontent au 14ᵉ siècle. Depuis 1980, elle est largement consommée pour son activité anti-cholestérol. Elle possède en effet une teneur élevée de monacoline K, une molécule de la même famille que les statines, qui stabilise le taux de cholestérol dans l’organisme.

Les études réalisées sur la levure de riz rouge ont confirmé son efficacité pour maintenir un taux normal de cholestérol LDL. En effet, elle empêche la synthétisation du cholestérol, en inhibant l’action de l’enzyme HMG-CoA réductase. Elle est prescrite en tant que médicament hypolipidémiant pour prévenir les accidents cardiovasculaires.

La monacoline K est par ailleurs efficace pour réduire le taux de lipides dans le sang. Cette molécule équilibre le taux de bon et mauvais cholestérol1.

Par ailleurs, elle contient également des omégas-6, de petites quantités de phytostérols, d’isoflavones ainsi que des gras monoinsaturés. Ils agissent aussi sur le taux de cholestérol contenu dans l’organisme, en le réduisant de 13 à 44 %. Les premiers effets se font ressentir au bout de quatre semaines de consommation. Ainsi, on peut se demander pourquoi la levure de riz rouge à 10 mg de monacoline K est interdite par les autorités.

À titre d’information, près de 18 % de la population française souffre d’hypercholestérolémie et utilise ce complément alimentaire2.

Les apports nutritionnels

Elle joue un rôle considérable sur le bon fonctionnement de l’organisme. Sa teneur en calories n’est pas précise, mais une fois le riz rouge cuit, 100 g contiennent 141 Kcal. Il apporte à l’organisme 3,4 g de protéines, 28,2 g de glucides et 0,7 g de lipides. En plus d’être une source importante de calories, elle renferme de la monacoline K en abondance.

Par ailleurs, elle aide l’organisme à perdre du poids. Un excès de mauvais cholestérol dans le sang augmente la sensation de faim. Ainsi, la levure de riz rouge est efficace pour entamer un régime minceur ou une diète. Sa consommation limite les effets dits « yo-yo ».

De nombreuses recherches ont été menées sur cette molécule pour comprendre ses effets sur le cholestérol et en 2012, la Commission Européenne ainsi que l’European Food Safety Authority (EFSA) ont prononcé son efficacité.

Est-ce vraiment sans danger pour la santé ?

Derrière les belles promesses de la levure de riz rouge, ce complément alimentaire cache quelques effets indésirables à ne pas négliger.

Suite à une biopsie, des lésions au foie ont été constatées chez une sexagénaire qui en a consommé en excès3. Pour faire baisser son taux de cholestérol, elle s’en servait comme une alternative aux statines.

En Italie, environ 10 cas d’hépatotoxicité en lien avec c e produit ont été diagnostiqués entre 2002 et 20154. Aussi, The Lancet a publié en 2003 des cas cliniques. L’étude démontre des cas d’infarctus du myocarde et d’insuffisance hépatique et même d’hémorragie.

Les monacolines étaient au centre des controverses depuis ces dernières années. Près de 25 cas ont été rapportés à l’ANSES depuis le lancement du dispositif nutrivigilance, concernant les effets indésirables de la levure de riz rouge. La majorité des effets secondaires concerne des atteintes musculaires (myalgies) et des maladies hépatiques.

Une nouvelle réglementation

Suite à ces effets secondaires déclarés, les autorités européennes ont mis en place une nouvelle règlementation pour ces compléments alimentaires et la levure de riz rouge à 10 mg de monacoline K est interdite.

Le 1er juin dernier a été publié le Règlement (UE) 2022/8605. Il s’agit d’une rectification du Règlement (UE) 1925/20066, qui fait mention de l’adjonction des produits alimentaires et médicaux contenant des monacolines. Les restrictions concernent la dose consommable en une journée et les prescriptions supplémentaires sur leur consommation. Le règlement a été mis en application le 22 juin dernier dans tous les États membres de l’Union européenne. La rédaction du Règlement inclut l’Avis de l’EFSA du 25 juin 2018 et sa publication est demandée à la Commission Européenne, après avoir analysé la requête des instituts nationaux, comme l’ANSES, du 14 février 20147.

En pratique :

  • La commercialisation de compléments alimentaires contenant plus de 3 mg de monacolines de levure de riz rouge est interdite à partir du 22 juin 2022.
  • Un message de mise en garde sur sa surconsommation et son impact sur la santé est publié.
  • L’étiquette doit mentionner le fait que le produit est interdit aux moins de 18 ans et aux plus de 70 ans.

Pourquoi ?

La levure de riz rouge à 10 mg de monacoline K est interdite pour les raisons suivantes :

  • De nombreux effets secondaires ont été mis en évidence suite à sa consommation ; ils ont été rapportés à l’ANSES.
  • Certains consommateurs n’utilisent pas ce complément alimentaire de manière adéquate.
  • Pris concomitamment avec des statines chimiques, des effets secondaires peuvent apparaître.
  • Le taux de monacoline K, indiqué sur l’étiquette des produits, n’est généralement pas correct.
  • Une enquête publiée par l’association « UFC-Que choisir » a révélé que le taux de cette molécule est erroné dans près de 80 % des produits.

Son utilisation par les particuliers doit être encadrée. Les personnes de moins de 18 ans ainsi que les séniors de plus de 70 ans ne sont pas autorisés à en consommer. Ce complément ne doit pas être associé à d’autres médicaments qui abaissent le taux de lipides dans le sang.

Quelles sont les conséquences ?

La levure de riz rouge à 10 mg de monacoline K est interdite ; ainsi, elle n’est plus efficace pour réduire le taux de lipides dans le sang. En effet, l’EFSA avait estimé que pour que ces produits soient efficaces, ils devaient renfermer 10 mg de cette molécule. Cependant, à l’heure actuelle, ils ne peuvent en contenir que 3 mg ; les compléments alimentaires n’ont plus la même efficacité. D’ailleurs, les fabricants n’ont plus le droit de mentionner qu’ils aident à réguler le cholestérol.

En Conclusion

En raison de certains effets secondaires déclarés, les autorités ont diminué la dose de principe actif maximal dans ces compléments alimentaires ; la levure de riz rouge contenant 10 mg de monacoline K est interdite. Ce produit n’a donc plus d’intérêt puisqu’il n’est pas suffisamment concentré pour avoir une action notable sur le cholestérol. Le risque d’effets secondaires est minoré, mais l’efficacité n’est plus au rendez-vous.